Il y a quelques décennies, « Dédé » Carsalade vendait « La Dépêche du Midi » à la criée sur la place toulousaine. Sourire espiègle, ton gouailleur, il annonçait la principale nouvelle du jour précédée d’un tonitruant « Enfin ça y est », la suite étant généralement fleurie et la morale m’interdit d’en rappeler quelques-unes …
« Dédé » n’est plus de ce monde auquel il ne comprendrait plus grand-chose mais, « enfin ça y est » : Colomiers a enchaîné deux victoires en battant Grenoble 25 à 20 jeudi une semaine après un succès sur Béziers. Cela n’était plus arrivé depuis la fin du mois de septembre. Une éternité. Il a fallu deux matchs consécutifs à domicile aux Columérins, qui ne parviennent plus à s’exporter depuis quatre mois, pour réussir ce coup de deux. Il permet au club à la Colombe de conserver la cinquième place du classement de la Pro D2 à l’issue de la 24e journée (plus que six de saison régulière) avec le même capital que le quatrième, Nevers (62 points). Le duo possède une longueur d’avance sur Carcassonne et quatre sur Montauban qui mettra son calendrier à jour ce jeudi à Béziers. La compétition ne reprendra ensuite que le jeudi 31 mars avec un épicé Carcassonne-Colomiers à l’affiche.
Les Columérins ont eu du mal à bâtir leur victoire face à une équipe grenobloise dont le classement (13e) ne reflète nullement la réelle valeur mais qui fonctionne sur courant alternatif. Ne venait-elle pas de secouer Nevers après avoir été capable de s’imposer à Bayonne au mois de janvier ? Solides défensivement, bien aiguillés par leur n°9 argentin Felipe Ezcurra, les Isérois ont proposé beaucoup de mouvement face à des Haut-Garonnais forts d’une mêlée dominatrice mais toujours victimes de leurs imprécisions en gâchant trop de munitions avec des fautes de main ou en s’exposant à des gratteurs comme le Sud-Africain Marnus Schoeman, un expert en la matière. Les locaux ont la plupart du temps buté sur la ligne adverse, ne parvenant pas à la perforer et finissant par rendre le ballon après avoir amorcé une action prometteuse. Heureusement, en première mi-temps, Peni Rokoduguni était tout de même arrivé à déchirer le rideau avant de servir Karl Château pour un premier essai avant un deuxième inscrit à la conclusion d’un ballon porté par Guillaume Tartas. De quoi s’assurer dix points d’avance au repos (17-7).
Au cœur de la seconde période, Youssef Saaidia, auteur d’une rentrée percutante après avoir été éloigné des terrains pendant plus de trois mois, s’est offert une course de 45 mètres tel un centre pour plonger dans l’en-but alors que les Grenoblois venaient d’égaliser avec un essai de Marnus Schoeman, leur deuxième après celui en force du jeune pilier Irakli Aptsiauri (20 ans) en première période.
Le tout avant un final haletant. Mais, un match sans suspense, c’est un peu comme Johnny sans Hallyday, un western sans joueur d’harmonica, Rita sans Mitsouko, Madonna sans petite culotte (oh pardon). Il manque quelque chose. La victoire n’a donc tenu qu’à un fil aussi ténu que ceux de la vierge. Les Columérins ont pu compter sur leur caractère et leur défense pour endiguer les ultimes assauts de Grenoblois peu avares, eux aussi, en pertes de balles (5 en-avant après l’heure de jeu).
Soulagés, les Columérins ont alors pu fêter joyeusement les 28 printemps de Jean Thomas, leur capitaine du soir. Ils venaient aussi d’offrir une belle victoire à la mémoire de Laurent Broudin, un fidèle de la Colombe disparu une semaine auparavant.
Jean-Paul Pronzato