Champion olympique du 800 mètres en 1972 à Munich, l’Américain Dave Wotlle fut également recordman du monde de la distance. Toujours coiffé d’une casquette, il avait pour habitude de passer plus de la moitié de ses parcours à musarder en queue de peloton. Certains observateurs le pensaient alors condamné, du moins à ses débuts, mais lui connaissait ses ressources. Et il signait de spectaculaires remontées.
Lors des deux premières journées de Pro D2, les Columérins ont fait du Wotlle : contre Aix en refaisant un handicap de seize points pour s’imposer 34 à 19 ; à Oyonnax pour gagner 23 à 21 après avoir été menés 12 à 0 sur la pelouse de l’un des deux grands favoris, avec Bayonne, de la course au Top 14.
Il est prématuré d’annoncer que Colomiers va se mêler à cette lutte même si l’objectif est une place dans les « six », mais l’équipe a démontré qu’elle avait les moyens d’évoluer dans la cour des grands. La sérénité et la solidité défensive qu’elle a affichées dans l’Ain le prouvent.
Avec un ensemble remodelé (8 changements dans le XV de départ), les Columérins ont d’entrée manifesté un désir de jouer, annihilé cependant par leur indiscipline (18 pénalités au final et un carton jaune ; 9 contre les locaux) et une mêlée en souffrance sanctionnée à six reprises. Tout en donnant le bâton à l’arbitre et à des Oyonnaxiens qui n’avaient que la réussite de leur buteur pour scorer, ils pouvaient s’appuyer sur une défense de fer animée par de véritables enragés du plaquage. Avec un jeu plein d’allégresse, donnant de la vie au ballon à la moindre occasion, ils parvenaient à faire basculer le sort de la rencontre. Johan Deysel et Aldric Lescure, à la conclusion d’actions de haute volée, finissaient dans l’en-but avant la mi-temps, alors que l’équipe était en infériorité numérique, et dès la reprise.
Passés près d’offrir la victoire à leurs hôtes, nos Columérins avaient progressivement mis la main sur les débats et, si le score est étriqué, leur succès n’est certainement pas un hold-up. La meilleure équipe a gagné ce beau match de rugby.
Au passage, saluons les premières minutes à ce niveau de l’ailier Jules Cordier, 20 ans. Vu seulement en amical, ce Tarn-et-Garonnais d’origine faisait partie des Crabos champions de France 2019. Encore un lancé dans le grand bain.
Avec deux victoires et un joker dans la manche, Colomiers est sur de bons rails. Il s’agira de ne pas en sortir vendredi lors de la réception d’Aurillac. En faisant preuve du même esprit de corps qu’à Charles-Mathon, tout est possible. « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage », a dit Boileau. Alors, garçons, remettez-nous ça !
Jean-Paul Pronzato
