Café gourmand
Il est encore possible d’assister à un bon match de rugby (bon, pas forcément beau) sans qu’aucun essai ne meuble le score. Ce fut le cas jeudi soir à Colomiers, alors qu’une pluie glaciale s’était invitée, lors d’une rencontre ponctuée par le succès du club à la Colombe aux dépens de Brive (15-9) et de son artillerie lourde. Sans essai validé. Car Rodrigo Marta en a inscrit deux, invalidés après arbitrage vidéo. Les buteurs ont donc fait le job à l’image de Thomas Girard, auteur d’un 4/4 dans ses tentatives avec, en outre, un drop de Maxime Javaux avant sa sortie prématurée entraînant un remaniement des lignes arrières. Il nous a permis d’apprécier le punch retrouvé d’un garçon comme Martin Dulon rarement vu à son avantage depuis le début de la saison.
Métamorphosés par rapport à leurs dernières sorties (Rouen et Agen), les Columérins, pourtant indisciplinés — ils ont été souvent pénalisés au sol —, ont dominé les débats à partir d’une énorme défense, le symbole du caractère et de la solidarité, dans le sillage d’une troisième ligne de gala. Ajoutez une conquête touche-mêlée royale (pas un ballon perdu face à l’alignement réputé des Corréziens), un bon jeu au pied d’occupation et vous comprendrez comment les Brivistes, malgré une certaine efficacité dans les grattages, ont pu voir leurs velléités se briser sur le mur bleu.
Si le groupe Trois Cafés Gourmands a pu vanter les mérites d’une Corrèze qu’il avait dans le cathéter (« À nos souvenirs ») , les Columérins, eux, y avaient une grinta retrouvée et ils ont pu servir un café gourmand à leur public. Leur mission pouvait, au coup d’envoi, paraître très difficile. Impossible disaient certains. Et pourtant… Il y a quelques décennies, Max Urbini, footballeur devenu une sommité du journalisme sportif, racontait dans l’une de ses savoureuses chroniques sur RMC la vision de l’impossible de Numa Andoire, ancienne gloire de l’OGC Nice. Devenu entraîneur, celui-ci expliqua un jour à l’un des ses jeunes joueurs que rien n’était impossible si ce n’était de remettre le dentifrice dans son tube après l’en avoir sorti.
Avec ce Colomiers-là, tout semble possible, dans un sens comme dans l’autre tant l’inconstance frappe l’équipe. Alors, si le dentifrice n’est pas gaspillé, ses joueurs mordront peut-être à belles dents dans le succès.
*Le Columérin du match : Joseva TAMANI
Jean-Paul Pronzato